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Et toi, que faisais-tu en mars 2020 ?

Au-delà des nouvelles frontières

Mars 2020...

Quand on pense à mars 2020, on pense au confinement strict.

On se rappelle avoir fermé nos portes dans l’incertitude du lendemain. On se souvient des informations alarmantes qu’on préférait cacher aux enfants. On se souvient des rayons vides des supermarchés. On se souvient de journées entières devant les écrans : télétravail, école, courses, musique, danse, apéro… tout se faisait en visio.

On se souvient du kilomètre à ne pas dépasser pour vite s’aérer. On se souvient aussi des applaudissements de 20 heures et des attentes, comme jamais, de discours nous permettant de mieux envisager la suite. On se souvient aussi des masques qu’il fallait fabriquer ou se procurer comme du pain en temps de famine. Enfin, on se souvient de la peur de nos voisins qui nous disaient bonjour de loin.

Tout s’était arrêté.

Notre foyer était devenu notre nouvelle frontière...

Comment cette période a-t-elle été perçue par de jeunes adultes

En MLDS (Mission de Lutte contre le Décrochage Scolaire), le pôle FLE (Français Langue Étrangère) accueille chaque année des jeunes de 16/17 ans nouvellement arrivés sur le territoire français, pour les aider à construire un projet professionnel. Ils nous ont parlé de leur "Mars 2020". Certains étaient déjà en France, d’autres étaient en transit ou encore dans leur pays d’origine. Ils nous racontent...

Abdramane, arrivé en France en mars 2020 : « En mars 2020, je me trouvais à Valence. J’étais à la maison, j’avais un peu peur parce que personne n’était dehors. Je regardais la télévision et je me demandais tous les jours comment le confinement allait se terminer. »

Abirami, sri-lankaise : « J’étais à Valence, à la maison, parce que tout était fermé pour Covid. Ce que j’ai ressenti : bien mais pas contente. »

Moustapha, camerounais : « Je venais d’arriver en France. J’ai passé le confinement à Nice. Quand je me réveillais le matin, je me brossais les dents, je prenais ma douche, après, je prenais mon petit déjeuner. Je passais mon temps à jouer au baby-foot avec les amis à l’hôtel où j’étais confiné. Des fois, on causait, on rigolait pour passer le temps. Je ressentais mon corps fatigué tout le temps. Je me sentais enfermé comme si j’étais en prison. »

Un autre jour Moustapha a ajouté à l’oral : « Tu sais, c’était bizarre pour nous parce qu’on n’a jamais connu la France autrement. On a quitté notre pays et quand on est arrivés, on nous a enfermés ici. »

Alassane était en France depuis deux mois : « J’étais déjà en France, j’étais confiné pendant trois ou quatre mois chez Jean et Pascal. C’était dur pour moi. C’est la première fois que j’ai vu ça. Je faisais du sport avec Matéo et Paul. C’était la catastrophe pendant le confinement. Tous les magasins étaient fermés et les salles de sport aussi.
Pendant le confinement j’ai appris beaucoup de choses avec les cours de français et les cours de cuisine dans ma famille d’accueil. Souvent je travaillais dans leur jardin aussi. »

Mamadou, guinéen : « En mars 2020, j’étais à Nouakchott, en Mauritanie, on n’était pas confinés. On jouait au foot toute la journée et le soir on regardait le journal à la télévision pour connaître les nouvelles. Beaucoup de pays étaient confinés. »

Mohamed : « Je n’étais pas encore arrivé en France. J’étais quelque part en Afrique. Je n’étais pas confiné. »

Ismaël, ivoirien : « Pendant le mois de mars dernier, j’étais en Lybie. Là-bas, j’étais dans un grand camp. J’avais peur des informations sur la Covid parce que là-bas, les conditions n’étaient pas bonnes. Dans le camp, il n’y avait pas de gestes barrières. »

Mory, malien : « J’étais en Italie. J’ai été confiné trois mois dans un foyer. On jouait au foot dans la cour. »

Déo-Gracias était dans son pays d’origine, au Bénin, avec sa grand-mère : « En mars dernier, j’étais à Abomey. On n’est pas resté à la maison, j’allais à l’école, c’était bon. »

Quand nous en parlions en classe, les élèves n’étaient pas tous d’accord. Parmi ceux qui ont vécu un confinement, certains l’ont perçu comme une pause après leur long voyage. Mais d’autres l’ont vécu comme un emprisonnement ou un échec à leurs projets. Aussi, quand on leur demande ce qu’ils savent de la crise sanitaire dans leur pays d’origine, certains nous disent que chez eux, le confinement n’existe pas ou, au contraire, que c’est plus dur que chez nous car la police n’hésite pas à frapper les gens qui sortent.

Paroles recueillies par Laetitia Giorgis, enseignante FLE